Introduction
La réanimation travaille sur la vie elle-même et à son maintien
Soins et thérapeutiques de derniers recours
Tente de proposer une survie après le passage d’un cap dans des conditions de vie acceptable
ACTUELLEMENT
Code de Santé Publique
- “Des unités aptes à prendre en charge des patients présentant plusieurs défaillances viscérales, circulatoires, rénales et respiratoires aiguës mettant en jeu leur pronostic vital”
Prise en charge des patients avec des pathologies graves dont le taux de mortalité peut avoisiner les 50%
Discipline coûteuse (prix journée de séjour: > 2000 euros) avec un nombre de lits limités
I. Le patient en réanimation
Le plus souvent connu de l’équipe uniquement
Sous sédation: ne parle pas
“Techniqué”: sonde naso-gastrique, sonde uriniaire, cathéter artériel, cathéter veineux central, scope, respirateurs, dialyses, monitorage hémodynamique spécialisé
Risque pour tous face à la technique de déshumanisation
Au quotidien, travail coolectif pour redonner son identité et son humanité à chaque patient
Rôle essentiel de l’IDE et de l’AS en raison notamment d’une intimité créée avec le patient au cours des soins quotidiens
Les échanges informels avec l’entourage familial permettent d’évoquer la vie, les désirsdu patient, ses envies, ses joies et aident à personnaliser les soins et l’environnement du patient
Lui redonner son identité
- C’est lui redonner sa dignité humaine, son statut d’être humain autonome avec ses désirs, ses souhaits, son cadre de vie
Le regard des proches et personnels change dans une chambre où l’environnement a été personnalisé
Ce travail sur l’identité au quotidien contribuera à donner plus de sens au séjour du patient en réanimation et/ou à la fin de la vie du patient
II. Décision et réanimation
3 temps avec des impératifs de décision spécifique
- Faut-il commencer ?
- Y a-t-il une place pour continuer ?
- Comment s’arrêter ?
La question de la gestion de l’arrêt ou de la limitation de thérapeutique et son corollaire de fin de vie
N’est que la dernière question éthique d’un long cheminement
Doit rentrer dans le cadre d’une dynamique réflexique quotidienne (réflexion devant être l’objet de tous)
Ne peut se voir ni se concevoir de façon isolée par rapport à
- L’ensemble de l’histoire du patient concerné
- L’ensemble de l’équipe de soins
- Le patient et ses proches
III. Pourquoi arrêter ?
1ERE OPTION
Succès de la prise en charge: le patient peut retourner dans un service conventionnel
2E OPTION
Refus exprimé par le patient ou rapporté par un proche de façon itérative et réfléchie
3E OPTION
Obstination déraisonnable ? Acharnement thérapeutique ?
Reconnaître une situation de fin de vie
SITUATION DE FIN DE VIE
Le malade est inguérissable
- Le processus mortel est irréversible
- Il n’y a pas de survie possible
De la poursuite du traitement on n’attend qu’une survie accompagnée de séquelles lourdes
- Incompatibles avec une qualité de vie acceptable pour le patient
La réflexion doit s’appuyer sur l’évaluation de l’ensemble
- Des éléments anamnestiques
- Des éléments cliniques, paracliniques
- Des éléments pronostiques
IV. Comment arrêter ?
Option 2 et 3: une référence incontournable
- La loi “Leonetti” 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie
- 15 articles
- Processus d’élaboration sur 9 mois
- Une loi votée à l’unanimité
- Reforme le code de santé publique
LEONETTI LES PRINCIPES
La consécration de l’interdiction de l’acharnement thérapeutique
- “Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable”
- “Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, les actes de soins peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris”
Le renforcement de l’information du patient et introduction de la notion de double effet
- “Si le médecin constante qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en informer le malade, la famille ou, à défaut, un des proches”
Le renforcement du libre choix du malade conscient
- “Lorsqu”une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, décide de limiter ou d’arrêter tout traitement, le médecin respecte sa volonté après l’avoir informée des conséquences de son choix”
- Si la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables
- Il peut faire appel à un autre membre du corps médical
- Le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable
- La décision du malade doit être retranscrite
- Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de la fin de sa vie
La dépénalisation de la limitation de traitements à la condition du respect de la procédure
- La dépénalisation exclusivement en cas de respect de la procédure
- Article 122-4 du code pénal: “N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires”
- Le patient peut ne jamais présenter les complications envisagées
- Dans environ 50% des cas le patient survit à l’issue du séjour en réanimation
- Il s’agit donc non pas de provoquer la mort mais de laisser le processus physiologique se dérouler sans intervention technique ou médicamenteuse jugée sans bénéfice pour le patient
La consécration des soins palliatifs
- “Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la diginité de la personne malade et à soutenir son entourage”
- Mesures d’accompagnement
- Soutenir la famille et les proches
LE PATIENT “HORS D’ÉTAT D’EXPRIMER SA VOLONTÉ”
Rechercher et consulter
- La personne de confiance
- La famille et les proches
- Les directives anticipées
LES DIRECTIVES ANTICIPÉES
Article 7 décret n°2006-119
Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté
Elles doivent être écrites, datées, signées et authentifiées par le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance du rédacteur
Les directives anticipées peuvent être modifiées à tout moment, partiellement ou totalement. Elles sont révocables à tout moment.
“A condition qu’elles aient été établies moins de trois ans avant l’état de l’inconscience de la personne, le médecin en tient compte pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement la concernant”
LA PERSONNE DE CONFIANCE
La loi du 4 Mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé
Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance pour
- L’aider dans ses décisions
- Recevoir l’information à sa place
- Etre consultée lorsque l’intéressé est hors d’état d’exprimer sa volonté
Cette personne peut être un parent, un proche, le médecin traitant…
La désignation doit se faire par écrit. Elle est révocable à tout moment, même oralement
L’avis de la personne de confiance, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, à l’exclusion des directives anticipées, dans les décisions d’investigation, d’intervention ou de traitement prises par le médecin
LA MISE EN OEUVRE DE LA “PROCÉDURE COLLÉGIALE”
“Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, la limitation ou l’arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie par la code de déontologie médicale et les directives anticipées de la personne”
La décision motivée de limitation ou d’arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical
EN PRATIQUE
Les prérequis
- Rechercher et prendre en compte les directives anticipées
- Interroger la personne de confiance
- Interroger la famille et les proches sur ce qu’aurait voulu le patient
La procédure collégiale en deux phases: la concertation et la décision
La concertation avec
- La famille et les proches
- Le personnel soignant non médical en charge du patient
- L’équipe médicale
La décision
- Obtenir l’avis concordant d’au moins un autre médecin
- Pas de lien hiérarchique entre médecin en charge du patient et consultant
La traçabilité
- Retranscription des différentes étapes sur le dossier médical
LIMITATION
Le patient peut ne jamais présenter les complications envisagées
Dans environ 50% des cas le patient survit à l’issue du séjour en réanimation
Il s’agit donc:
- Non pas de provoquer la mort
- Mais de laisser le processus physiologique se dérouler sans intervention technique ou médicamenteuse jugée sans bénéfice pour le patient
V. Synthèse Leonetti
2 cas évoqués par la loi du 22 Avril 2005
Situation de fin de vie
- Patient apte à consentir
- Patient inapte à consentir
PATIENT APTE À CONSENTIR
Possibilité de refus de traitement du patient
Responsabilité du médecin en charge d’assurer les meilleures conditions de réflexion au patient
- Dispenser une information exhaustive sur les bénéfices et les risques de la stratégie proposée
- Instaurer un dialogue approfondi
- S’assurer de la parfaite compréhension des enjeux par le patient
- Faire intervenir un tiers extérieur si besoin
- Respecter un délai de réflexion suffisant
PATIENT INAPTE À CONSENTIR
Possibilité de limitation ou d’arrêt des traitements à la condition de mettre en oeuvre la procédure de réflexion collégiale
Responsabilité du médecin en charge dans la prise de décision (co-responsabilité du chirurgien pour le patient chirurgical)
- Assurer une concertation avec l’équipe médicale, paramédicale en charge du patient
- Consulter la personne de confiance, la personne référente, la famille ou à défaut les proches
- Rechercher d’éventuelles directives anticipées
- Solliciter un avis motivé d’au moins un médecin, appelé en qualité de consultat
DANS TOUS LES CAS
Soins de confort et respect de la dignité du patient
Accompagnement des proches
Traçabilité des différentes étapes du processus décisionnel
VI. Arrêt support ventilatoire
CADRE GÉNÉRAL
2 techniques se distinguent dans leurs modalités et leurs effets: l’extubation et l’arrêt de la ventilation mécanique
Objectif premier: le confort du patient et éviter de prolonger une agonie difficilement ressentie par l’ensemble des intervenants
Différence entre ces 2 techniques: l’exacerbation possible d’une détresse respiratoire, qui sera plus ou moins rapide selon la technique employée
Nécessitent l’application de procédures de sédation-analgésie à doses suffisantes
L’aule ou l’autre de ces deux techniques peut être employée selon
- Le cas particulier du patient
- La perception des proches
- La perception du personnel
EXTUBATION
Avantage
- Ne pas prolonger un processus inéluctable
- Procédure claire, sans ambiguïté
- Restaure un déroulement plus naturel de la fin de vie
Nécessite
- La parfaite compréhension par les proches (leur adhésion à la décision comme à ses modalités d’application)
- Une présence particulièrement soutenue du personnel paramédical auprès du patient
Implique
- S’assurer de la disponibilité et de l’acceptation du personnel paramédical qui sera alors en charge du patient
- Le médecin sénior (médecin référent) en charge du patient doit être présent durant toute la procédure d’extubation
Les proches peuvent être présents s’ils le souhaitent. Ils seront informés du déroulement de la procédure.
ARRÊT VENTILATION MÉCANIQUE
Diminution progressive ou rapide de
- La FiO2
- Et/ou de la fréquence respiratoire
- Et/ou du volume courant et/ou de la pression expiratoire positive
- Pouvant aller jusqu’au débranchement du respirateur
Peut apparaitre comme moins traumatisante psychologiquement pour
- Les proches
- Le personnel paramédical
VII. Nutrition / hydratation
LA LIMITATION OU L’ARRÊT DE L’HYDRATATION
Il n’y a pas d’interdiction à l’arrêt ou à la réduction de l’hydratation. C’est un traitement comme toute suppléance d’une fonction vitale défaillante.
La réduction de l’hydratation peut, dans certaines conditions, améliorer le confort du patient, en particulier par la diminution de l’encombrement bronchique
Mais
- La sécheresse des muqueuses qu’il induit doit être prévenue
- Une attention particulière doit donc être portée au confort du patient dans cette situation
VIII. Double effet
DOUBLE EFFET
Chaque acte a ses effets positifs et ses effets indésirables
“On peut accomplir un acte ayant à la fois un bon et un mauvais effet seulement si le bon effet est supérieur au mauvais et si, de surcroît, au moins les conditions suivantes ont été remplies:
- L’acte en lui-même doit être bon ou moralement neutre ou tout au moins ne doit pas être interdit
- Le mauvais effet ne doit pas être un moyen de produire le bon effet, mais doit être simultané ou en résulter. Le mauvais effet prévu ne doit pas être intentionnel ou approuvé mais simplement permis
- L’effet positif recherché doit être proportionnel à l’effet indésirable et il n’y a pas d’autre moyen pour l’obtenir”
Il est permis de prescrire des médicaments pour traiter des symptômes jugés insupportables par la personne malade, même si’il est probable que ces traitements risquent d’abréger sa vie, si les conditions suivantes sont remplies:
- Aucune autre initiative, médicale ou non, ne peut être proposée pour soulager la personne malade au stade terminal
- Le but visé est affirmé comme un but thérapeutique, dont les effets, y compris les effets secondaires attendus sont proportionnels à l’intensité des symptômes
Critères
- Intentionnalité
- Motif de l’acte
- Priorisation des effets bénéfiques sur les mauvais effets
IX. La sédation
Pour soulager, avec un risque de décès, mais le décès n’est pas l’objectif (double effet)
2 situations en réanimation
- La limitation de traitements vitaux, ou le décès est retardé mais ne survient pas: sédation à adapter aux symptômes
- L’arrêt de traitements de support vital / les cas “d’urgence de fin de vie”: la sédation devient une urgence, les symptômes doivent être prévenus ou traités sans délai
X. Euthanasie
Acte par un tiers consistant à provoquer intentionnellement la mort d’un patient afin de soulager ses souffrances physiques ou morales considérées comme insupportables
A différencier de “suicide médicalement assisté”: donner au patient les moyens de mettre fin à sa vie
Non légal en France
Conclusion
La fin de vie en réanimation et en dehors de la réanimation
- Le patient au coeur du soin
- Arrêter ce n’est pas abandonner
- Traçabilité, transparence, discussion
Loi du 22 Avril 2005
- Un impératif
- Un cadre légal amené à évoluer